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 Monarchie de Juillet 1830-1848

Après le soulèvement des Parisiens pendant les Trois Glorieuses en juillet 1830, Charles X abdique et part en exil.

Fondée sur la Charte, pacte entre la nation et le roi, la nouvelle monarchie est confiée à son cousin le duc d'Orléans, proclamé le 9 août roi des Français sous le nom de Louis-Philippe 1er.

Le catholicisme n'est plus religion d'État, mais religion "professée par la majorité des Français". 

Le drapeau tricolore est définitivement adopté et remplace le drapeau blanc.



Les "libéraux" victorieux, d'esprit voltairien, qui gardent le souvenir des persécutions subies par les écoles mutuelles, attaquent les positions de l'Eglise qui a lié sa cause au trône que l'on vient d'abattre.

Des manifestations se multiplient contre les écoles congréganistes. De nombreux conseils municipaux réduisent ou suppriment les subventions accordées sous la Restauration aux écoles des Frères pour les donner aux écoles communales laïques.

De Broglie, ministre de l'Instruction publique et des cultes, diminue les subventions allouées aux écoles congréganistes et enlève aux évêques la nomination de membres des comités d'arrondissement.


La coalition gouvernementale éclate après l'affrontement du parti « du mouvement » et du parti de « la résistance » sur la question du sort des ministres de Charles X.

Le parti "du Mouvement" (ou Mouvement vers la démocratie), s'appuyant sur la petite bourgeoisie, considère que la révolution doit se prolonger et désire une extension du droit de vote. Le parti de "la Résistance" (résistance au mouvement), soucieux de défendre les intérêts de la bourgeoisie, s'identifie au nouveau régime monarchique et pratique une politique de " juste milieu".

Le ministère Laffitte, représentant le parti "du mouvement", est constitué le 2 novembre 1830.


Les catholiques adversaires du régime de juillet attaquent le monopole de l'Université et réclament la liberté d'enseignement. Liberté de l'enseignement qui est toujours soutenue par la Société pour l'instruction élémentaire élaborée par des libéraux de tout temps hostiles au monopole universitaire et à l'église.

Les ministres de l'instruction publique et des cultes, repoussent la loi scolaire attendue et promise par la Charte. Devant la pression, le ministre Barthe dépose le 20 janvier 1831, devant la Chambre des Pairs, un projet de loi sur l'enseignement primaire. Celui-ci n'étant pas favorablement accueilli est retiré un mois après.

Loi Guizot 28 juin 1833

Lettre Guizot 18 juillet 1833

Guizot comprend qu’un grand nombre de maîtres, dispersés dans les campagnes les plus reculées, livrés depuis de nombreuses années à tant de hasards, ont besoin d’un guide pour leur indiquer la voie. Il adjoint aux recteurs des délégués spéciaux chargés de visiter les écoles afin de les guider.

Au moment de mettre à exécution sa loi, il mène une grande enquête sur l'état moral et matériel des écoles primaires. 490 personnes sont chargées de cette "inspection extraordinaire".

Cela lui permet de créer en 1836 un corps d'inspecteurs primaires. (Voir page, l'inspection)

Avec ces documents Paul Lorain établit dans un livre le tableau de l’instruction primaire en France.

Enquête 1835 dans l'Eure

- L'écolier de Charlet

« Fabricant d’hommes »


Avant la loi sur l’enseignement primaire (1833), le corps enseignant, si l’on peut donner ce nom aux maîtres isolés qui enseignaient la lecture et l’écriture, n’était composé que de maîtres improvisés : domestiques du curé, sacristains, chantres, anciens séminaristes, dont la vocation n’avait point persisté ; déclassés de tout genre, dont quelques-uns avaient un commencement d’instruction secondaire qu’ils ne pouvaient utiliser : nulle connaissance de la profession. On enseignait dans un alphabet dit Croix de par Dieu ; on continuait en ânonnant une lecture de mots auxquels l’enfant ne comprenait rien.

Les maîtres étaient loin de s’imaginer que ce qu’ils faisaient était l’embryon de cette profession qui devait arriver à de si heureux résultats. L’obligation d’avoir des maîtres formés spécialement pour l’enseignement donna l’idée de la création des Ecoles normales, pépinière de jeunes maîtres appelés à rendre les plus grands services : instruire les hommes, faire leur éducation, éclairer leur esprit, cultiver leur cœur, afin de rendre le plus utile possible leur court passage sur la terre. Mais il fallait du temps avant d’avoir ces nouveaux maîtres. En attendant qu’ils fussent formés, on essaya d’améliorer les anciens. On fit venir chaque année ces maîtres de 18 à 60 ans, par escouade de 40 à 50, afin de les initier autant que possible aux nouvelles méthodes. J’étais chargé de ce cours, ce qui me priva de vacances pendant cinq années. Je ne sais pourquoi les jeunes et espiègles normaliens avaient surnommé « trous de choux » ces élèves d’un nouveau genre. Ces maîtres réunis formaient un ensemble des plus pittoresques : variété d’âge, de costume, d’instruction ; mais phénomène singulier, assis sur les bancs des élèves, ces hommes, qui affectaient une gravité que l’on croyait nécessaire, indispensable autrefois, à ceux que l’on désignait sous le nom mal compris de pédagogues, ces hommes si graves séparément, devenaient de vrais écoliers, distraits, se faisant de petites niches et des malices. Ils redevenaient enfants et s’amusaient comme des enfants. Un jour, un instituteur distingué d’un chef-lieu d’arrondissement, membre du comité local et instruit dans son genre, un homme de 60 ans, à cheveux blancs, grand-père, courait après un de ses collègues : il brise une branche de pommier ; craignant qu’on ne s’en aperçût et se rappelant, sans doute, ce qu’il avait vu faire par un de ces élèves, il fit disparaître la branche, prend un peu de terre, la délaye, en fait un emplâtre avec lequel il cache la blessure de l’arbre. Content de son travail, il saute en l’air (pas bien haut, il avait 30 ans dans chaque jambes), fait une pirouette et retombe sur ses pieds ; mais, en sautant, il avait vu le directeur qui riait de bon cœur ; ses camarades en firent autant et il eut le bon esprit de les imiter.

En faisant revenir ces maîtres à l’Ecole, on avait aussi pour but de les initier à la connaissance des nouvelles mesures qui, seules, devaient être en usage en France à partir de 1840.

Comment se faire une idée de l’ignorance de tous et de la difficulté de leur exprimer l’utilité et la simplicité du nouveau système ?

Pour bien faire comprendre à ces maîtres qu’un mètre carré vaut cent décimètres carrés, il fallait le dessiner sur le sable ; qu’un mètre cube vaut mille décimètres cubes et équivaut à la contenance de plus de quatre barriques ; qu’un décimètre cube est la contenance d’un litre ; qu’un mètre cube d’eau pèse 1000 kilos, etc, il fallait faire une démonstration sensible ; tout ce qui n’avait pas été expérimenté restait discuté.

(Eugène Livet, l’école nouvelle, 1906)

Médaille Louis-Philippe 1er, roi des français.

Instructions primaires, 1er prix.

Manuels distribués par les préfets aux écoles pour les enfants indigents.

- Arithmétique raisonnée par M. H. Vernier, librairie classique de L. Hachette, 1832.

- Alphabet et premier livre de lecture, à l'usage des écoles primaires, publié par MM L. Hachette et Firmin Didot, 1833.

Hachette


Louis Hachette livra au gouvernement, pour les préfectures et sous-préfectures, qui les distribuaient gratuitement dans les écoles, des masses considérables de livres élémentaires, dont plusieurs étaient excellents, et qui sont longtemps restés les seuls classiques de l'école.

Déjà, en 1832, il avait, de concert avec F.G. Levrault, Firmin Didot frères et Jules Renouard, fondé le Manuel général de l'instruction primaire, destiné, dans l'origine, à populariser ces nouvelles méthodes et à en enseigner le fonctionnement aux instituteurs.

Lorsque s'ouvrirent les premières salles d'asile, Louis Hachette entreprit, en 1835, la plus ancienne publication périodique destinée à l'éducation de la première enfance qui ait paru dans notre pays, l'Ami de l'enfance.

Une autre publication périodique, d'un caractère plus général, la Revue de l'instruction publique en France et dans les pays étrangers, avait été créée par Louis Hachette en 1842, en vue de défendre, dans une mesure libérale, la cause universitaire, contre laquelle on préludait déjà, à cette époque, aux attaques passionnées et incessantes qui ont fini par triompher en 1850.

  

L’Enseignement primaire supérieur


C’est dans la loi scolaire de 1833 qu’il apparaît.

«  De ce premier degré d’instruction, dit Guizot dans l’exposé des motifs, à l’instruction secondaire qui se donne soit dans les institutions et pensions privées, soit dans les collèges de l’Etat, il y a bien loin, et pourtant, dans notre système actuel d’instruction publique, il n’y a rien entre l’un et l’autre… De là il résulte qu’une partie très nombreuse de la nation qui, sans jouir des avantages de la fortune, n’est pas non plus réduite à une gêne trop sévère, manque entièrement des connaissances et de la culture intellectuelle et morale appropriées à sa position… Nous croyons rendre au pays un vrai service en établissant un degré supérieur d’instruction primaire qui, sans entrer dans l’instruction classique et scientifique proprement dite, donne pourtant à une partie nombreuse de la population une culture un peu plus relevée… »

L’école primaire supérieur a donc été fondée pour donner un enseignement général intermédiaire entre l’enseignement primaire proprement dit et l’enseignement secondaire.

Après le décès de Casimir Périer, un nouveau gouvernement se constitue le 11 octobre 1832 avec comme ministre de l'Instruction publique, Guizot qui partage l'opinion générale des hommes de "la Résistance".


L’ordonnance du 14 février 1830 de la Restauration, portait qu’il sera établi au moins une école modèle préparatoire par académie pour former les instituteurs. Par le règlement du 14 décembre 1832, les Ecoles normales, exclusivement départementales, deviennent également des établissements de l'Etat. Le directeur de l'Ecole est désormais nommé par le ministre et les maîtres-adjoints sont désignés par le recteur.


Guizot est un protestant, chrétien convaincu attaché à la morale de l'Evangile, qui estime la religion encore plus nécessaire au salut de l'homme que l'Etat. Il cherche un ralliement de l'Eglise qui soutient la cause du" légitimisme" au régime de juillet (situé à l'extrême droite, les Légitimistes considèrent Louis-Philippe comme un usurpateur, ils sont partisans de Charles X ou du duc de Bordeaux). C'est sur l'action prépondérante et unie de l'Etat et de l'Eglise qu'il compte pour fonder l'instruction primaire.

Il rétablit à dater du 25 avril 1833 les subventions à l'Institut des Frères et exempte les maîtres-adjoints congréganistes de l'obligation du brevet.


La loi du 28 juin 1833 marque une étape importante dans l’histoire des progrès de l’instruction primaire. Elle est un compromis entre l'esprit libéral et voltairien de 1830 et l'esprit chrétien et conservateur de Guizot.

Guizot rassemble l'instruction primaire dans un grand corps intégré à l'Université.

L'instruction primaire devient élémentaire ou supérieure ; elle est ou privée ou publique.

Les communes sont tenues d'entretenir au moins une école primaire élémentaire. Tout département est tenu d'entretenir une école normale primaire.

Il doit être fourni à tout instituteur un local, tant pour lui servir d'habitation, que pour recevoir les élèves et un traitement fixe d'au moins de deux cent francs. En plus du traitement fixe, l'instituteur doit recevoir une rétribution mensuelle dont le taux est réglé par le conseil municipal. Les élèves désignés par les conseils municipaux dont les familles ne peuvent payer aucune rétribution sont admis gratuitement.

Guizot fait un appel au dévouement des instituteurs par sa lettre du 4 juillet 1833. Pour la première fois le chef de l'instruction publique s'adresse à eux.

La loi donne la liberté aux instituteurs privés en supprimant l’autorisation préalable, et en renonçant à toute autorité sur les méthodes. Elle garantit la situation des instituteurs publics. Elle charge le conseil municipal de proposer l’instituteur public ; mais après l’avis du comité local, et sous la décision du comité d’arrondissement.

Le comité local est présidé par le maire. Le comité d’arrondissement est présidé par le préfet ou le sous-préfet, et se compose avec lui du maire du chef-lieu, d’un juge de paix, d’un ministre de chacun des cultes autorisés, d’un membre de l’enseignement secondaire et d’un membre de l’enseignement primaire, de trois membres du conseil d’arrondissement désignés par leurs collègues, et des membres du conseil général résidant dans l’arrondissement.

Rien n’est fait pour l’instruction des filles. Il faut attendre 1836 pour que la division en deux degrés soit étendue à l’enseignement féminin.

  

La déplorable médiocrité des livres destinés à l’enseignement élémentaire peut servir d’excuse à l’incapacité des maîtres. « Les croix de par Dieu, les psautiers latins, les abécédaires de Limoges avec figure de girafe ou d’éléphant, n’avaient au moins qu’un tort, celui de mal seconder les leçons du maître et de laisser languir l’instruction de l’enfant ; mais combien d’autres n’ajoutaient-ils pas à ce danger le danger bien plus grand encore de fausser de bonne heure le jugement par des fables grossières, et souvent de corrompre le cœur par des lectures immorales ou impies. » (P. Lorain).

Guizot fait préparer cinq manuels qui doivent servir de base à l’enseignement et à le régler.


L'ordonnance du 23 juin 1836, étend aux filles les règles en vigueur pour les garçons, sauf sur trois points :

1) Les écoles primaires privées de filles ne sont pas "libres".

2) Les sœurs, membres de congrégations reconnues, sont dispensées de l'examen de capacité.

3) Aucune contrainte pour les communes de création d'une école de filles, ni pour les départements d'ouverture d'une Ecole normale d'institutrices.


La Révolution de 1830 avait suscité dans les villes la création pour les adultes de cours spéciaux nés des besoins locaux du commerce et de l'industrie. L'arrêté du 22 mars 1836, les règlemente pour des précautions particulières dans l'intérêt des mœurs et du bon ordre. (voir page Cours d'adultes)

En 1837, les salles d'asile sont encadrées. Ce sont des établissements charitables où les enfants des deux sexes peuvent être admis jusqu'à l'âge de six ans accomplis pour recevoir les soins de surveillance maternelle et de première éducation que leur âge réclame. (voir page Salles d'asile)

L’Université est critiquée par les libres penseurs l’accusant d’hypocrisie, et par les catholiques d’impiété.

Pour la première fois, après cinq ans d'une inlassable activité, l'enseignement primaire a une organisation cohérente.



A partir de 1840 le roi confie le pouvoir à François Guizot.

La première loi sur le travail des enfants dans les manufactures est votée le 22 mars 1841. Il s’applique exclusivement dans les fabriques employant plus de 20 ouvriers et dans les usines « à feu continu » (machines à vapeur). Cela exclue donc de nombreux secteurs de l’économie, en particulier l’artisanat et l’agriculture, et limite aussi l’impact de la loi dans l’industrie car les petits ateliers y sont majoritaires. La loi fixe l’âge minimum pour travailler à 8 ans, et limite à 8 heures le travail des enfants de 8 à 12 ans, avec un temps de repos obligatoire, et à 12 heures pour les enfants de 12 à 16 ans. Le travail de nuit est interdit pour les enfants en dessous de 13 ans. Une obligation de scolarité est fixée pour les enfants de moins de douze ans et pour les plus âgés, un certificat délivré par le maire doit justifier qu’ils ont reçu l’instruction primaire élémentaire. Ce dernier doit aussi délivrer aux enfants un livret spécifique mentionnant leur état-civil, leur degré d’instruction ainsi que les dates d’entrées et de sorties des manufactures qui les emploient.


La charge d’inspection de tout un département étant trop lourde pour un seul fonctionnaire, des sous-inspecteurs sont créés.

L'ordonnance du 18 novembre 1845 organise définitivement le corps d'inspection.

Pour couronner l'édifice de l'inspection une ordonnance du 9 novembre 1846 crée deux postes d'inspecteur supérieur de l'Instruction primaire.

  

Statut école 1834

Règlement des écoles 1835

Ecoles publiques :

Celles entretenues, en tout ou en partie, les communes, les départements ou l'Etat.

Elles peuvent être laïques ou congréganistes.

Ecoles privées :

Financement uniquement privé.

Elles peuvent être laïques ou congréganistes.

Les hommes de "la Résistance" font l'éloge de l'Université seul moyen pour eux d'éviter l'anarchie scolaire. Casimir Perier à la tête du nouveau gouvernement (13 mars 1831-11 mai 1832) fortifie le contrôle des écoles et de l'enseignement par l'Université.

L’exigence pour les candidats instituteurs d’obtenir un certificat de bonne conduite délivré par le curé et un certificat d’instruction religieuse est abrogée. Les congréganistes doivent désormais subir l'examen du brevet (ordonnance du 18 avril 1831).

La Société pour l'Instruction élémentaire se développe et multiplie les fondations d'écoles mutuelles. L'ordonnance royale du 29 avril 1831 la reconnaît comme établissement d'utilité publique apte à intervenir en justice, à acquérir, aliéner, recevoir legs et donations après autorisation. Le Roi alors duc d'Orléans, avait adhéré dès le début à la Société et avait fondé et entretenu des écoles mutuelles.


Après l'agitation des premiers mois, un apaisement contre l'église s'opère.

Inquiets des agitations de la rue, le gouvernement commence à penser qu'il ne serait pas mauvais pour la monarchie de s'appuyer sur la puissance d'ordre qu'est l'église. Des hommes comme Cousin (philosophe spiritualiste), Rendu, montrent la nécessité humaine et l'utilité sociale de la religion. Cousin regarde le christianisme bien enseigné comme un moyen de civilisation pour le peuple et un soutien nécessaire pour les individus auxquels la société impose de pénibles et humbles fonctions sans aucun avenir de fortune, sans aucune consolation d'amour propre.

L'administration adopte maintenant une attitude conciliante à l'égard des congréganistes.


Le 12 août 1831, renouvelant une décision de 1828, le ministre Montalivet décide la création d'une commission chargée d'examiner les livres utilisés dans les écoles, de sélectionner les meilleurs et d'en dresser le catalogue.

Pour les publications à l'usage des maîtres, le gouvernement décide en 1832 la publication d'un recueil périodique à l'usage de l'enseignement primaire : le Manuel de l'Instruction Primaire. La rédaction est confiée à Matter, inspecteur général, et la publication à la Librairie Louis Hachette et les éditeurs Firmin Didot, Jules Renouard et Levrault.


Le principe de l'instruction populaire est accepté par la majorité des vainqueurs de juillet mais sur l'étendue de l'instruction à donner au peuple et sur les moyens, des divergences apparaissent. Si certains acceptent d'ouvrir les portes du savoir, la majorité de la bourgeoisie estime que de savoir "lire, écrire et compter" suffit, de crainte que l'instruction trop développée dégoûte le petit peuple des travaux de première nécessité. Sur les moyens, certains réclament à la fois l'obligation et la gratuité pour propager l'instruction, la majorité écarte l'obligation au nom des droits de la famille et la limite aux indigents au nom des impératifs financiers.

Montalivet présente un projet sur l'instruction primaire après une proposition de loi déposée par Las Cases, membre de la Société pour l'Instruction élémentaire. Les deux textes proposent la liberté de l'enseignement promise par la Charte, celui de Montalivet qui s'inspire de Cousin, consacre les pouvoirs de l'Université et rétablit le contrôle ecclésiastique sur l'école alors que celui de Las Cases, s'en remet entièrement aux initiatives individuelles et aux municipalités.

Dans le projet Montalivet on y trouve déjà presque toutes les dispositions essentielles de la loi de 1833, dont il ne diffère que sur un petit nombre de points.

Le projet est ajourné quand Montalivet quitte le ministère.

  

- Tableau de l’instruction primaire en France d’après des documents authentiques et notamment d’après les rapports adressés au ministre de l’instruction publique par les 490 inspecteurs chargés de visiter toutes les écoles de France, à la fin de 1833, par P. Lorain. Chez L. Hachette, 1837.

  

Victor Cousin est un philosophe et homme politique français, né à Paris le 28 novembre 1792 et mort à Cannes (Alpes-Maritimes) le 14 janvier 1867

Il devient ministre de l'Instruction publique dans le second ministère Thiers du 1er mars au 28 octobre 1840. Son influence est immense et on peut le considérer comme l'instigateur de l'œuvre scolaire qui sera accomplie par la III° république.

  

Bilan de l'enseignement primaire à la fin de la Monarchie



L'enseignement primaire réalise sous le régime de Juillet une progression sensible, mais il reste beaucoup à faire. L'amélioration affecte à la fois sur l'effectif des maîtres et des écoles et la qualité de l'enseignement.

Un nombre élevé d'enfants et surtout de filles (40%) n'assistent pas ou assistent irrégulièrement aux travaux scolaires. D'abord un certain nombre de communes n'ont pas d'école (4000 communes réfractaires se trouvent à peu près toutes dans l'Ouest et les régions montagneuses du Centre). D'autre part, certains parents n'attachent aucun prix à une instruction dont ils sont démunis. Les écoles rurales se vident au printemps pour de menus travaux, la surveillance de frères et sœurs ou la garde du bétail, et récupèrent leurs effectifs qu'en novembre.

Les locaux scolaires à la charge des communes sont souvent délabrés et insalubres. Le mobilier scolaire, non imposé aux communes, se limite au strict minimum, les maîtres devant équiper l'école eux-mêmes (voir page La salle de classe).

Malgré les distributions d'ouvrages gratuits par l'Administration, les livres manquent, les familles refusant tout achat.

Sur le plan pédagogique, la méthode individuelle, fléau de l'Ancien Régime, décline au profit de la méthode simultanée mais reste quoi qu'en disent les statistiques la plus pratiquée, cela s'explique par la médiocrité du personnel qui n'en connaît souvent pas d'autre.

La méthode mutuelle recule perdant sa raison d'être avec l'augmentation du personnel.

Un grand nombre de maîtres qui l'avaient pratiquée ou s'étaient initiés comme moniteur, la combinent avec la méthode simultanée pour aboutir à une méthode appelée "mixte" (voir page La pédagogie).

La pédagogie reste archaïque. On apprend l'alphabet lettre par lettre et l'arithmétique par cœur, sans raisonnement. L'enseignement de l'écriture commence après l'achèvement de la lecture suivi par le calcul suivant trois taux de rétribution. L'enseignement religieux qui a une place importante, nuit aux autres disciplines.


Pendant les vacances, des cours de perfectionnement sont ouverts dans les Ecoles normales pour les instituteurs "insuffisants".

Pour élever la condition des instituteurs, la loi de 1833 accorde un traitement fixe minimum de 200 francs qui est souvent le maximum qu'ils perçoivent de la commune. Leur rétribution mensuelle, laissée à l'appréciation des Conseils municipaux, est au plus bas quand ils arrivent à la percevoir, et souvent payée en nature. Les Conseils municipaux sont plus généreux pour dresser la liste d'indigents admis gratuitement à l'école.

La situation des instituteurs est plus misérable que celle de beaucoup d'ouvriers. L'âge n'apporte aucune amélioration, la loi qui prévoit la création de caisses d'épargne alimentées par la retenue du vingtième du traitement fixe, permet pour la plupart au bout de trente ans de services, d'obtenir de quoi vivre environ deux ans. Il est ensuite réduit à la misère ou à la mendicité.

Si médiocre que soit leur situation, la fonction assure une sécurité relative et les dispense du service militaire. Une fois libérés des obligations militaires beaucoup d'instituteurs "capables" s'orientent vers une autre administration ou des activités industrielles et commerciales mieux rémunérées.

Pour vivre, ils doivent exercer d'autres fonctions ; être secrétaire de mairie et chantre de la paroisse.

Chez les institutrices le recrutement est difficile, peu sont disposées à se consacrer à une carrière pénible et misérable. A défaut de laïques ce sont les congrégations renaissantes qui recrutent la majorité du personnel de "haute moralité" mais de "faible qualité". Les institutrices laïques sont formées, elles-mêmes, par des sœurs. Sur les huit Ecoles normales d'institutrices qui s'ouvrent, cinq sont dirigées par des religieuses ; les Cours normaux dans les pensionnats sont en majorité congréganistes.


Les maires, chefs immédiats de l'instituteur et premiers surveillants de l'école, presque partout se désintéressent de ses attributions. Autoritaires, incompétents, ils considèrent l'instituteur comme un subalterne au même titre que leur garde-champêtre.

Les curés, plus souvent défiants et réservés à l'égard de l'instituteur laïque, parfois hostiles, souhaitent établir des frères et des sœurs dans les communes. Ils sont favorables à l'école qui est une annexe de l'église et prépare l'enseignement de la religion.

Les comités locaux défaillants sont plutôt un obstacle aux progrès scolaires.

Je n'admets, ni ceux de chantre, de bedeau, de sonneur qui en feraient les domestiques des curés. Je n'admets pas davantage celui d'arpenteur qui en ferait les domestiques de tout le monde, tandis que les instituteurs ne doivent être les domestiques de personne. Je consens à ce qu'ils soient secrétaire de mairie ; c'est là une position convenable ; toutefois à une condition, c'est qu'il soit bien entendu qu'ils ne sont pas secrétaires des maires mais bien des mairies. (Boulay de la Meurthe)

Gavarni, les gens de Paris.

Nouveaux enfants terribles

- 3, gravé par Leblanc

  

- L'institutrice, dessin de Bertall

- Le maître d'école endormi (1831) de Joseph Beaume.

Boulay de la Meurthe, président de la Société pour l'instruction élémentaire, évoque la misère des maîtres devant les députés et propose des augmentations de crédit au chapitre de l'instruction primaire. Le ministre Villemain s'y oppose et répond qu'un projet de loi est à l'étude.

En mai 1846, Salvandy, revenu au ministère de l'instruction publique, dépose à l'assemblée un projet restreint qui améliore le traitement des instituteurs et donne plus de pouvoir à l'Université.

La plus grande partie des instituteurs sont dans une situation qui n'est celle d'aucun des services publics et que ne supporterait aucun service privé. L'état moral et utile de cette classe d'hommes souffre des misères de son état matériel. Tous sont obligés de recourir à des fonctions diverses et multipliées.

Il est bien accueilli des intéressés mais rencontre l'hostilité des catholiques.

En fin de session parlementaire rien n'est fait et Boulay de la Meurthe déplore que tantôt par négligence ou par oubli, tantôt parce qu'il y a mieux à faire ou parce que la session est trop avancée, toujours par une cause inacceptable, toutes les propositions faites pour leur venir en aide (aux instituteurs) sont indéfiniment ajournées.

L'aggravation de la situation économique porte à son comble la misère des instituteurs qui ne peuvent obtenir le payement des rétributions mensuelles dues par les pères de famille incapable de payer.

Un nouveau texte est préparé puis déposé le 31 mars 1847. Il est accueilli sans enthousiasme. Critiqué par tous il est ajourné.


La Monarchie disparaît, emportée par les journées populaires de février.

  

- Ecole. Commencement des misères et des tribulations de la vie.

Gravure de Charlet.

- Entrée des enfants dans la Salle d'asile Cochin.

L'Illustration du 1er juin 1844.

  

- L'école de village, de Thomas Webster