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 Pédagogie

Célestin Freinet et l'Ecole Moderne

Célestin Freinet est né dans une famille modeste, le 15 Octobre 1896 à Gars (Alpes Maritime). Il passe sa jeunesse de petit paysan dans une région pauvre, où il la vit en étroit contact avec la nature.

Réussissant bien en classe, poussé par son instituteur, il entre en pension au Cours Complémentaire à Grasse pour préparer le brevet élémentaire, puis à l'École normale de Nice.

En Octobre 1914, quand éclate la première guerre mondiale, sans faire sa 3e année d'école normale, Freinet est nommé instituteur stagiaire en remplacement d'un instituteur mobilisé. 

Il est mobilisé lui aussi l'année suivante, il n'a pas 19 ans et rejoint le front avec le grade d'aspirant.

En octobre 1917, il est grièvement blessé au poumon par balle au Chemin des Dames. Il est déclaré officiellement mutilé de guerre à 70%.

Dans Touché!, Freinet raconte les circonstances de sa blessure.

Militant syndical et politique


Après la première guerre mondiale, nombreux sont les enseignants pacifistes marqués dans leur chair et dans leur conscience. Syndicalistes révolutionnaires regroupés dans la Fédération des syndicats des Membres de l’Enseignement laïques, ils luttent pour que ne se reproduise plus la tuerie de 14-18, pour mettre fin à l’exploitation capitaliste et construire une société plus juste et plus humaine. Au sein de la commission pédagogique et dans leur revue l’École Émancipée ils réfléchissent aux moyens de promouvoir une pédagogie populaire par l’École Active et les centres d’intérêt...


Après une longue convalescence, Freinet est nommé, en janvier 1920, instituteur adjoint à l'école de garçons de Bar-sur-Loup, au nord-est de Grasse.

Sur la grand-place, étrangement pittoresque et d’un archaïsme touchant, avec ses ormes centenaires, sa vieille fontaine qui chante, depuis des siècles, sa même chanson si fraîche, l’école de garçons est installée au rez-de-chaussée de la Mairie.
L’école est vieille, comme tout ce qui l’entoure ; ses murs s’écaillent lamentablement ; bancs et tables sont usés par des successions, à travers les âges, de coudes appliqués et de grosses semelles étoilées de clous.
Vingt-cinq gosses, de cinq à dix ans, viennent de rentrer de récréation et se bousculent pour regagner leur place.
Un homme jeune - trente ans à peine - à la chevelure brune et romantique, largement rejetée en arrière, comme pour découvrir un front où bouillonne la pensée, essaie de mettre un peu d’ordre dans ce chaos scolaire et dans ces criailleries ; c’est M. Freinet.
(L’Eclaireur de Nice et du Sud-Est Mardi 6 juillet 1926)


Passionné par son métier et désireux de changer l’école, Freinet profite de ses congés pour rencontrer d’autres pédagogues (Ferrière, Claparède, Bovet, Cousinet) et lire les classiques de la pédagogie contemporaine.

Il milite sur le plan syndical et politique et participe à de nombreuses œuvres coopératives comme l' Abeille baroise.  

Dès 1920, il débute une longue série d'articles dans à la revue École Émancipée, organe de la tendance révolutionnaire du syndicalisme enseignant.

En 1922, Freinet visite l'école d'Altona, un faubourg de Hambourg ; là, sous la direction de Heinrich Siemss, il voit une école sans autorité, sans discipline, où se pratiquent des « promenades scolaires », où existe un matériel scolaire abondant et spécialisé.

En 1923 commence une collaboration avec Clarté, revue proche du P.C., animée par Henri Barbusse. Tous deux sont persuadés que la véritable pédagogie populaire, comme la véritable psychologie, "doit venir d'en bas".

Il participe à Montreux au 2e congrès de la Ligue Internationale pour l'Education Nouvelle.  Il y rencontre Cousinet venu rendre compte de ses premières tentatives de travail en équipe. Tout en reconnaissant la qualité du travail réalisé, Freinet est très critique devant la conception aristocratique de l'Education Nouvelle, il recherche plutôt, une éducation nouvelle populaire.


A la rentrée d'octobre 1924, Freinet supprime tous les manuels scolaires dans sa classe. Pour fixer et magnifier l'expression des enfants et pour servir de médiation avec les livres des adultes il introduit l'imprimerie. Il débute avec une petite presse Lino.

Les manuels sont un moyen d’abrutissement. Ils servent, bassement parfois, les programmes officiels. Quelques-uns les aggravent même, par je ne sais quelle folie de bourrage à outrance. Mais rarement des manuels sont faits pour l’enfant. Ils déclarent faciliter, ordonner le travail du maître ; ils se vantent de suivre pas à pas... les programmes. Mais l’enfant suivra, s’il peut. Ce n’est pas de lui qu’on s’est occupé.
C’est pourquoi les manuels préparent la plupart du temps l’asservissement de l’enfant à l’adulte, et plus spécialement à la classe sociale qui, par les programmes et les crédits, dispose de l'enseignement.
Il y a bien quelques pédagogues ingénus qui se basent au contraire sur les désirs et les besoins de l’enfant pour arriver à une conception moins orthodoxe de l’enseignement. Mais on tolère à peine leurs manuels. En tous cas les maisons d’édition bien pensantes ne daignent pas s’en charger. Et seuls connaissent les grands tirages les manuels les plus pernicieux.
Même, les manuels seraient-ils bons, il y aurait tout intérêt à en réduire le plus possible l’emploi. Car le manuel, surtout employé dès l’enfance, contribue à inculquer l’idolâtrie de l’écriture imprimée. Le livre est bientôt un monde à part, quelque chose d’un peu divin, dont on hésite toujours à contester les assertions.

« C’est dans le livre... » Tandis qu’il serait désirable justement d’enseigner que le livre n’est qu’une pensée imprimée - comme toute pensée, sujette à erreur - et qu’on doit pouvoir contredire comme on contredit quelqu’un qui parle (Clarté n°73, avril 1925, rubrique : Vers l’école du Prolétariat)

La classe-promenade (1922), « l'étude du milieu local »

La première innovation de Freinet est la classe-promenade où l'on va observer le milieu naturel et humain, et dont on rapporte à l'école les échos oraux, puis écrits. Les textes ainsi produits sont corrigés, enrichis et constituent le socle de l'apprentissages élémentaires classiques qui en font eux un instrument direct d'amélioration de la communication.

L'enfant est et doit être enraciné dans le milieu naturel et social (traditions, mentalités, exigences sociales, y compris celles de l'institution scolaire avec ses programmes).


Le « matérialisme pédagogique » (1922)

Freinet revient de Hambourg avec la conviction qu'il faut un matériel scolaire adapté. D'où l'importance d'une situation spécifique de l'école (proche de la nature, avec potager, fruitier, espace d'élevage) et d'un aménagement intérieur (salle commune pour travaux collectifs, ateliers spécialisés de travail manuel ; menuiserie, filature mécanique, etc., ateliers spécialisés en documentation, expression, expérimentation).


L'abolition de l'estrade

Faire disparaître l'estrade sur laquelle trône votre chaire, qui deviendra tout simplement une table comme les autres, au niveau et à la mesure des autres tables.


L'expression libre par l'imprimerie à l'école (1924)

Un texte est librement rédigé, à la maison ou à l'école, individuellement ou collectivement. Il est choisi par la classe pour être imprimé. Il est exploité grammaticalement et analysé du point de vue des intérêts des élèves qu'il révèle. Les questions et les problèmes dégagés, d'ordre historique, géographique, technique, etc. donnent l'occasion d'expériences physiques, de travaux d'atelier, de recherches documentaires. La classe se répartit les tâches ainsi induites. Dans un agenda sont inscrits les travaux à faire ultérieurement, les suggestions de visite, les questions pouvant faire l'objet de la correspondance scolaire. La rédaction libre est grandement motivée par « sa transcription majestueuse en caractère imprimé, son illustration et sa diffusion ».


Le travail de groupe

Freinet adopte la pédagogie de groupe élaborée par Roger Cousinet. Dès 1920, avec une poignée d’instituteurs volontaires, Cousinet expérimente sa méthode de travail libre par groupes. Son hypothèse de départ est simple ; les enfants sont capables d’organisation, d’effort, de persévérance pour des activités qui leur plaisent, comme les jeux. Pourquoi ne montreraient-ils pas les mêmes qualités pour des travaux qu’ils seraient à même de choisir et de conduire par eux-mêmes ? Au lieu d’enseigner, le maître prépare des documents, des objets, des plantes, des minéraux. Très vite, les enfants apportent les objets qui les intéressent. Le maître propose aux enfants de former librement de petits groupes de travail. Parmi les activités que choisissent les enfants, Cousinet propose, à l’imitation de Tolstoï, la rédaction de textes d’enfants, L’oiseau bleu (1920-1928).


La coopérative scolaire (1924)

L'idée vient de Barthélemy Profit. L'aspect communautaire prend la forme d'une communauté coopérative active, incarnée par la coopérative scolaire gérée par les élèves ; achat de disques, location de films, distribution de tâches, etc.

L'école Freinet donne un sens encore plus large au mot "coopérative" : La coopérative, c’est à la fois le bien commun, le lien du groupe, l’outil d’autogestion, le forum, l’école de la démocratie. Les réunions sont hebdomadaires. Au minimum, il s’agit d’un tour de tous les plans de travail. Mais presque chaque semaine on débat ensuite d’un sujet important pour le moment où on prend collectivement des décisions qui concernent tout le monde. Décision de participer ou non à un concours ; choix de ce qu’on fera pour y participer ; sélection de ce qui sera planté ou semé dans le potager ; décisions sur des achats ; réponse/débat au sujet des questions de la boîte à questions ; élaboration ou modification du règlement intérieur ; distribution des responsabilités ; élections… Comme il y a un (ou une) responsable de la coopérative, élu(e), c’est lui ou elle qui préside les débats, donne la parole, fait le compte-rendu ou attribue cette tâche à un autre enfant. Le rôle de l'instituteur se limite à veiller à ce que tout se passe bien, à prendre des décisions qui ne peuvent être prises par les enfants, à accélérer un peu lorsque le débat s’enlise.


Le journal mural (1925)

 Les élèves confectionnent un journal scolaire, affiché chaque semaine avec trois colonnes (critiques, félicitations, demandes).



La « boîte aux questions » ou « l'agenda scolaire »

« Agenda scolaire » préférable à la « Boîte aux questions » de destination similaire, sur lequel les élèves inscrivent les questions auxquelles vous répondrez conformément à nos indications. Mode d’emploi ; Questions, comptes rendus, conférences.



La correspondance inter-scolaire (1926)

 La correspondance avec une autre classe, plus ou moins éloignée géographiquement, est une ouverture de l'école vers l’extérieur d’une richesse infinie. Cela permet d’abord de motiver l’écriture, la lecture, le dessin. Cela fait découvrir de façon concrète d’autres modes de vie, d’autres contextes géographiques et culturels. Cela crée des attentes, des buts. Cela procure un public et des interlocuteurs pour les réalisations de toutes sortes. Les enfants peuvent partager avec leurs correspondants des recherches, des découvertes, des lectures. Il y a aussi un côté affectif puisque la communication se fait de classe à classe mais aussi d’enfant à enfant : chacun a son correspondant. Si l’on arrive à trouver les fonds, cela permet même de voyager à moindre frais puisque chaque enfant est reçu chez son correspondant. 


La cinémathèque coopérative de l'enseignement laïc (1927)

 Freinet adopte le cinéma et la radio à but pédagogique dès 1927.


La publication de textes et de dessins d'enfants (1927)


La transcription de récits de la tradition orale (1927)

 En 1927, les élèves transcrivent un conte populaire, Péquénain.

L'imprimerie à l'école


L'expérience de l'imprimerie que Freinet a entreprise dans son école s'avère positive. Les enfants sont passionnés.

Freinet publie plusieurs articles sur l'imprimerie à l'école dans Clarté et L'Ecole Emancipée.

Une imprimerie ! Mais toutes les écoles nouvelles - ou à peu près - en sont pourvues. Il en existe dans un grand nombre d’écoles allemandes et dans quelques écoles russes. A l’école du Dr Decroly en Belgique, les enfants impriment, avec une presse perfectionnée, une vraie revue mensuelle : Le Courrier de l’Ecole. En France pourtant, rares sont encore les initiatives semblables (L’Oiseau Bleu lui-même de M. Cousinet, écrit par des enfants pour des enfants, est cependant édité par un imprimeur).
Mais ces imprimeries ont, à notre avis, deux défauts capitaux. Assez perfectionnées pour imprimer un
Journal de l’Ecole, grand format, elles sont donc relativement très coûteuses, et ne peuvent être acquises que par des écoles privilégiées à quelque titre. On ne peut nullement en prévoir l’emploi pour les modestes écoles populaires.
De plus, on limite le but à un
Journal de l’Ecole, ordinairement mensuel, écrit et composé par les élèves. De ce fait, une telle imprimerie est déjà bien précieuse, car elle apporte nécessairement dans la vie de la classe un regain d’intérêt. Elle ne peut pourtant pas faire disparaître le dualisme de notre enseignement. L’élève est toujours en face de ces deux techniques : la lecture des textes manuscrits et la lecture des textes imprimés. Il ne sent la liaison entre l’une et l’autre qu’aux rares moment où il travaille à l’imprimerie.
Certes, l’imprimerie telle qu’on l’a employée dans ces écoles est un moyen puissant d’éducation logique et intéressante. Mais nous affirmons que c’est une technique insuffisante et que nous avons bien plus à apprendre de l’emploi constant, en classe, de l’imprimerie.
(L’Ecole Emancipée n°37, 13 juin 1926, rubrique : Chacun sa pierre)


Mais ce travail pour lui est insuffisant, il doit être échangé avec d'autres.

Cela nous permet de nous mettre et de nous tenir en communication avec d’autres écoles.

Ainsi nous correspondons depuis octobre dernier, avec une classe de l’école de garçons de Villeurbanne, dans le Rhône. Nous nous livrons à un échange très intense d’imprimés et de livres de vie. Nous appelons ainsi le petit volume, sommairement relié, dans lequel chaque enfant classe, chaque jour, une épreuve typographique quotidienne. Cela finit par constituer le plus attrayant et le plus instructif des livres de lecture. Trois autres écoles viennent d’acheter un matériel d’imprimerie, et nous allons nous mettre en rapport avec elles. Vous ne sauriez croire combien ce mouvement d’échange de pages imprimées, de cartes postales et de lettres constitue un profit intellectuel et moral pour nos écoliers. (L’Eclaireur de Nice et du Sud-Est du mardi 6 juillet 1926)

René Daniel, instituteur à l'école de Saint-Philibert à Trégunc, fait part à Freinet de travailler comme on travaille à Bar-sur-Loup. Il acquière, en 1926, une presse CINUP auprès de Freinet et imprime un premier texte libre les coquelicots qu'il envoie à Bar-sur-Loup. Ainsi débute une correspondance scolaire entre les deux écoles.


Freinet fournit aux instituteurs qui le souhaitent, une petite presse à main appelée la Lino fabriquée par un petit industriel de la région parisienne Cinup. Pas très pratique, il étudie un modèle plus adapté qu'il expérimente avec un ami menuisier.

L'idée de l'Imprimerie à l'école fait son chemin.

Freinet lance une Coopérative d’Entr’aide pédagogique avec une revue l’Imprimerie à l’École, mettant en place un réseau des Livres de Vie composés et imprimés par les écoles travaillant à l’imprimerie. (Voir page Le matériel d'imprimerie)


Célestin Freinet se marie avec Élise Lagier-Bruno en mars 1926.

Élise Lagier-Bruno est née, le 14 Août 1898 de parents instituteurs. Elle devient institutrice après son passage à l'École Normale de Gap. Artiste, elle obtient le prix Gustave Doré de la gravure en 1927. Elle apportera à Freinet sa compétence artistique.

Ils adhèrent tous deux au Parti communiste.


Le nombre des écoles travaillant avec l'imprimerie s'accroît, il passe en un an de deux à six, Pour faire fonctionner les échanges, Freinet met en place un réseau avec circulaires (Première Lettre Circulaire le 27 juillet 1926).


ORDRE DE LA CIRCULATION:

M. René DANIEL, à Trégunc (Finistère)

M. PRIMAS, 124, Cours E. Zola, Villeurbanne (Rhône)

M. Mme H. ALQUIER, à Vias (Hérault)

M. P. BORDES, à Saint-Aubin de Lanquais (Dordogne)

Mlle RIPERT à Béni-Saf (ORAN)

M. ALZIARY, à BRAS (Var)

M. R. Van MEER, Directeur de l'Ecole moyenne, Rue de Prospérité Bruxelles

M. Ad. FERRIERE, Directeur du Bureau International des Ecoles nouvelles,

10 Chemin PESCHIER CHAMPEL-GENEVE

C. FREINET BAR


Pour bénéficier du tarif postal réduit, Freinet propose de déclarer officiellement le journal de classe comme périodique. Des instituteurs envoient également à leurs correspondants des films Pathé-Baby de 9,5 mm tournés avec leurs élèves.

C'est en janvier que paraît L'Imprimerie à l'Ecole, premier livre de Freinet, édité par M. Ferrary.

Le réseau devenant vite trop grand (quarante puis quatre-vingt-onze), il crée la revue La Gerbe en avril 1927 dont les textes sont écrits par les enfants de différentes écoles.

Des textes d'enfants plus longs sont publiés dans de petites brochures (par un imprimeur professionnel) appelées Extraits de la Gerbe puis Enfantines en 1932.

Pour discuter des problèmes rencontrés, est créée l'imprimerie à l'école, d'abord simple circulaire dactylographiée qui deviendra brochure imprimée à partir de 1927.

En août, à l’issue du Congrès syndical de la Fédération de l’Enseignement (CGTU) à Tours, se tient le premier Congrès international de l’Imprimerie à l’École avec la présence de la majorité des 40 premiers adhérents actifs, dont un délégué du Ministère de l’Instruction Publique espagnole. Le soir, Freinet présente un petit film Pathé-Baby, représentant ses élèves au travail. Il est décidé d'en tourner d'autres et Boyau est chargé d'organiser leur diffusion.

Rémy Boyau avec d'autres instituteurs girondins, fondent alors en octobre, la Société Cinémathèque Coopérative de l’Enseignement laïc ayant pour objet d'acquérir, de fabriquer et de faire circuler parmi le personnel enseignant laïc adhérent, des films pédagogiques. De faciliter l'acquisition d'appareil de matériel cinématographique et de films. En général d'employer tous moyens matériels et pédagogiques susceptibles d'aider ses sociétaires utilisant le cinéma dans leur tâche scolaire ou post-scolaire.

Création de la C.E.L.


Au second congrès à Paris le 4 août 1928, les activités de l’imprimerie et de la radio fusionnent avec celles du cinéma au sein de la Société Coopérative de l’Enseignement Laïc (C.E.L.) dont la revue est l’Imprimerie à l’École. Elle permet d'éditer et de diffuser tout ce qui est nécessaire aux classes dites "Freinet".

Il est décidé que la C.E.L. travaillera en liaison constante avec les Syndicats de l'Enseignement dans lesquels elle s'intégrerait.

La répartition des tâches entre adhérents établie jusqu'à présent, s'avérant compliquée et risquée financièrement, tout est centralisé à Bar-sur-Loup sous la responsabilité de Freinet.

En octobre 1928 Freinet est nommé directeur à l'école de Saint-Paul (de Vence), petite ville touristique. L'installation du couple d'instituteurs communistes n'est pas très appréciée par certains, d'autant que leur action nationale et internationale se poursuit et s'amplifie.

L'administration, méfiante devant les innovations, n'ose attaquer Freinet qui peut se réclamer des Instructions officielles de 1923 nettement plus libérales et axées sur l'école active. Elle ne lui épargne cependant pas les tracasseries, refusant à plusieurs reprises à Elise Freinet un poste disponible à Saint Paul.

La C.E.L. commence en 1929 l'édition du Fichier scolaire coopératif favorisant l'individualisation.

Cette œuvre commune demandera de nombreuses années d'essais, de discutions et de mises au point. C'est Rousson (Masdieuu-Laval, Gard) qui prend la responsabilité générale de la réalisation pratique du Fichier. L'édition du fichier ne se fait pas sans poser un problème financier.


Des groupes de travail spécialisés pour telle ou telle discipline d'enseignement se créent. C'est ainsi que certains s'attachent à l'histoire, au calcul, ou à la grammaire.

Granier (Isère) regroupé avec Rossat-Mignot (Haute-Savoie) et Guillard (Isère) développe son point de vue sur la géographie :  "Je prends résolument pour base la géographie locale. Dans leur journal, nos petits correspondants ont écrit qu'ils désiraient connaître notre région. Nous l'étudions donc pour mieux la leur dépeindre".

Lavit, responsable de la radio, propose la fabrication "d'un poste quatre lampes, une haute fréquence, une détectrice et deux basses fréquences à transformateurs".

Freinet qui ne sait pas chanter, souhaite néanmoins susciter chez ses élèves les joies de la musique et du chant. Les auditions de T.S.F. sont pour lui non adaptées. Il se tourne alors vers le disque ... Le disque, au contraire, est patient ; le même contenu, le même passage, peuvent être repris un nombre indéfini de fois, démontrés, analysés.


Premières frictions avec L'Ecole Emancipée qui accepte mal que la CEL prenne ses décisions avant le congrès syndical d'Août 1930 à Marseille.

Freinet  fait une mise au point : Quelques camarades se sont étonnés de ne voir, dans notre bulletin, l'expression d'aucune idéologie sociale ou syndicaliste. En effet, notre silence à cet égard ressemblerait fort à ce souci de neutralité que nous critiquons dans la Nouvelle Education et la Ligue internationale pour l'éducation nouvelle.

Mais nous n'avons pas prétendu, et ne prétendons pas, faire de notre coopérative, ni de notre groupe, une association nouvelle, ayant des destinées propres, ses moyens d'actions et ses buts.

Persuadés que l'éducation ne peut rien sans l'appui vigoureux des organisations syndicales et ouvrières, nationales et internationales, nous nous considérons seulement comme un organisme d'études pédagogiques, laissant à nos syndicats, à nos fédérations, à nos associations diverses de défense corporative et idéologique, le soin de faire aboutir nos revendications.


La première presse automatique scolaire Billon (mécanicien à Corbelin en Isère, père d'élève de Faure) voit le jour suite au prototype réalisé par Antonin Pagès (des Pyrénées).

L'organisation commerciale de la coopérative s'est mise en place après de longs tâtonnements. La C.E.L. comporte maintenant cinq cents membres.

Les instituteurs et institutrices de l'enseignement laïc, demandent par pétition, que soient organisées en France des émissions radiophoniques spéciales pour les écoles.


Après un premier congé pour convenances personnelles, Elise retourne en classe et demande le poste d'adjointe nouvellement créé dans l'école de garçon de Saint-Paul (de Vence).

Elle ne l'obtient pas, elle est nommée à l'école de filles le 1er octobre 1930.

Au printemps 1931, son état de santé se dégrade rapidement (dépression générale) et un congé de longue durée lui est prescrit. Elle ne reprendra jamais sa classe.


L’Ecole, telle qu’elle est comprise dans l’immense majorité de nos classes, n’est, selon le mot de René Jadot, qu’un « microcosme capitaliste », régime de concurrence, du laisser faire et du chacun pour soi, de l’arrivisme. « Tyrannique et conservateur, disait Bernstein, ce système encore en usage presque partout est responsable dans une large mesure de l’apathie des gens instruits pour les affaires publiques, de leur tolérance en présence des méfaits accomplis autour d’eux, et de l’esprit mauvais qui anime tant de citoyens. Il est responsable du régime de favoritisme politique qui règne, et, pour une grande part, de l’égoïsme qui domine les affaires. » Et si nous devons essayer à l ‘école une action rénovatrice, il est certains que nous devons d’abord nous attaquer à cette tare essentiellement capitaliste, et jeter, dès le plus jeune âge, les frêles assises de la coopération de l’avenir. (Célestin FREINET, Les coopératives scolaires, Notes de Pédagogie Nouvelle révolutionnaire – 05/05/1929)

Le travail libre

 Les élèves élaborent avec le maître un plan général de travail pour la semaine, ainsi qu'un plan de travail individuel ou l'élève inscrit les tâches qu'il veut accomplir. Le travail libre de l'élève est rendu possible par la production d'une bibliothèque de travail, par des fichiers scolaires coopératifs, par des visites, enquêtes... On a donc le plan général, les plans annuels et mensuels, qui sont collectifs, et de plans hebdomadaires et quotidiens, qui sont individuels.


Les fichiers scolaires coopératifs : les F.S.C. (1929)

 Dans notre esprit, le ficher est d'abord un outil de travail en commun :  placées dans des classeurs spéciaux, les fiches seront utilisées par les élèves au fur et à mesure des besoins et le plus possible librement. Elles sont destinées à amplifier les travaux nés spontanément de l'intérêt vivant des enfants.

Le fichier scolaire comprenant des documents de toutes sortes imprimés ou collés sur fiches carton 13,5 x 21 ou 21 x 27, est classé selon la méthode décimale. Sur ce plan le travail est organisé d'une manière coopérative.


Le disque à l'école (1929)

Trop peu d'instituteurs ont compris quel outil merveilleux leur serait le phono s'ils le voulaient  implanter à l'école. Pas plus que le Pathé-Baby, le Pathé-Rural ou le Photoscope, le phono ne serait un jouet entre les mains du maître… Il (l'élève) comprendrait qu'il est une fenêtre ouverte sur le monde, un moyen de connaissance, un guide… Leçons d'histoire naturelle (chants d'oiseaux, cris d'animaux, bruits de vent, pluie, orage, etc…) ; leçon de géographie, documentation par le disque (musique chinoise, chant russe, créole, maoris, arabe, suisse, allemand, etc…) ; leçons de musique (études des thèmes musicaux, exemples d'œuvres, etc…). pour le chant tout est à faire…

Bibliothèque de Travail


Au congrès d'août 1931 à Limoges, il est décidé la création d'un fichier autocorrectif de calcul et une collection documentaire Bibliothèque de Travail.

Pour la création du fichier de calcul, un gros travail collectif est mis en œuvre. Freinet le définit comme étant tout à la fois un fichier d'étude et de documentation, servant à la construction, par les élèves, de problèmes vivants, en relation directe avec le centre d'intérêt et à la révision des notions mal connues… sorte de pont jeté entre l'intérêt initial et les nécessités scolaires… Nous adjoindrons à nos fiches-mères d'étude et de documentation un fichier d'exercices ; ce seront des problèmes conformes aux programmes et aux examens.

Le Camescasse, l'initiateur mathématique, outil très utile et apprécié, devient un matériel C.E.L..

L'année 1931 marque la fin de la collaboration de Freinet à l'Ecole Emancipée, pour désaccord avec l'orientation pédagogique de la revue. Désormais seul le Bulletin l'imprimerie à l'école qui a suffisamment d'audience, propagera ses idées.

En février 1932, est éditée par la CEL la première brochure Bibliothèque de Travail (B.T.).

Pagès glorifie le phonographe : c'est une machine merveilleuse qui a permis de mettre l'art musical, réservé jusqu'ici, non pas à une élite mais à une classe, à la portée de tous.

La CEL produit un court-métrage engagé Prix et profits réalisé par Yves Allégret avec les frères Prévert comme acteurs…

En octobre, la revue l’Imprimerie à l’École devient l’Éducateur Prolétarien.


Le 7 août 1932, une centaine de participants au Congrès international d'Education nouvelle qui se tient à Nice, présidé par Pr Langevin, visite l'école de Saint-Paul.

S'en est trop pour certains, une cabale s'organise pour chasser Freinet.

Le dessin libre (1931)

Le dessin d'enfant n'est pas à mesure du pédagogue, il est à la mesure de l'âme enfantine.

Laissons dessiner l'enfant. Ne regardons pas le dessin en soi ; regardons l'enfant dessiner si possible dans le monde de ses rêves et montons avec lui dans le domaine du merveilleux.

Bavardons ! Si nous n'écoutons pas les bavardages de l'enfant, que saurons-nous de lui ? La première difficulté pour le maître ce sera de laisser parler l'enfant. Ça n'est pas commode.

A l'Ecole Freinet les leçons de dessin sont des leçons de bavardage... ce sont des heures adorables ! Il en sort des chefs-d'œuvre que l'on tiendrait dans ses mains toujours comme une offrande perpétuelle au génie de l'enfant.



Contrôle et autocorrection : les fiches auto-correctrices (1932)

Le contrôle est assuré par la comparaison entre le plan individuel de travail avec le plan exécuté, par l'autocontrôle (fiches auto-correctrices), par l'attribution d'une note appréciative de la discipline, de la propreté et de la vie communautaire, enfin par la délivrance de « brevets » concernant les travaux pratiques réalisés par l'élève.

  

l'affaire Freinet


En pleine montée du fascisme et du nazisme en Europe, le Mouvement de l’Imprimerie à l’école et son leader Freinet vont être la cible de violentes attaques de l’extrême droite.

Charles Maurras lance une vaste campagne contre Freinet dans « l’Action Française ».

Malgré la pression officielle du maire sur les parents, 15 élèves sur 28 continuent à fréquenter l’école et veulent lui rester fidèles jusqu’au bout. Mais après les violences d'extrême-droite devant l'école de St-Paul en avril 1933, Freinet est contraint de se mettre en congé. Il fait l'objet d'un déplacement d'office.

Célestin Freinet quitte l’Éducation nationale, Elise demande sa mise à la retraite.

Pendant ces années de montée du fascisme l'atmosphère est tendue. Quelques autres adhérents font les frais d'une campagne de calomnies. Certains sont critiqués, déplacés, mal notés.

La réaction républicaine qui s'ensuit amène une détente.

  

Ouverture de l'école à Vence


Malgré la controverse au congrès de Reims en 1933 sur la création d'une école nouvelle, Freinet décide de la réaliser lui-même, non pas une école aristocratique comme certains le craignent, mais une école ouvrière et paysanne.

Il trouve à Vence, sur la colline du Pioulier, un terrain avec une maisonnette. Pour bâtir l'école, Freinet réalise les plans et emploie à la journée un artisan maçon qui a quelques ouvriers et qui fournit les matériaux ; pour financer les travaux, il emprunte et hypothèque la propriété. Tout le monde participe à la réalisation, jeunes et voisins.

Il ouvre, dans les formes légales, en octobre 1935, son école “prolétarienne” avec internat, malgré l'opposition de L'administration. Il reçoit une quinzaine d'enfants pour la plupart défavorisés ou de familles en difficulté.

Jean Zay, nouveau ministre après la victoire des partis de gauche, met fin à l'opposition faite à l'ouverture de l'école par l'inspection académique.

Libre enfin de ses recherches, Freinet peut créer son « laboratoire vivant ».

Le bassin qui sert de réserve d'eau pour l'arrosage des cultures, devient la piscine des enfants, mais aussi un moyen thérapeutique naturiste. Sous l'influence d'Élise, l'école de Vence prône la nourriture végétarienne, le bain froid, le naturisme, les bains de soleil, les médecines alternatives, etc.

Le démarrage ne se fait pas sans problème, mais il ne remet pas en question un système éducatif sans punition en renforçant les institutions coopératives pour la régulation du travail et des conflits ; il introduit le Plan de Travail individuel.


En écho au Front Populaire, Freinet lance le projet d'un "Front de l'Enfance" :

Il manque à ce pays le vaste mouvement de fond susceptible d'imposer aux gouvernements une action, vigoureuse et coordonnée, en faveur non seulement de l'école, mais de l'enfance et de la jeunesse.

Ce puissant mouvement de fond, le "front de l'enfance" prétend le susciter en France…

Il ne saurait se substituer aux partis prolétariens ni aux organisations syndicales auxquels il fera sans cesse appel. Il ne prétend entraver en rien l'action propre des organisations qui, actuellement, s'occupent de l'enfance ; il s'en voudrait de gêner tant soit peu l'activité progressiste de telle ou telle personnalité.

Son rôle est seulement de coordonner, d'unir, de montrer les buts à atteindre, de préconiser des moyens d'action, et de mobiliser si possible autour de ces associations et de ces personnalités, pour des buts précis, la grande masse populaire.

Cette belle idée n'aboutit pas.


Le mouvement progresse et la C.E.L. compte près de 1500 adhérents. Au congrès de Moulins en 1936, les groupes départementaux C.E.L. se développent.

La CEL tente un rapprochement avec SUDEL, la maison d'éditions du Syndicat National. Elle laisserait la partie commerciale pour ne conserver que la responsabilité des réalisations pédagogiques. C'est le statu quo.


N'arrivant pas à s'intégrer aux syndicats d'instituteurs, s'entendant bien avec Melle Emilie Flayol, Freinet et ses amis décident de participer aux travaux du Groupe Français d'Education Nouvelle (G.F.E.N.) qui s'ouvre à de nouvelles méthodes pédagogiques.

Freinet y défend la nécessité de faire, du Groupe Français d'Education Nouvelle, l'organisateur de toute l'action à mener en France sur le plan scolaire et social de l'éducation nouvelle.

Il regrette en 1937, que l'organisation actuelle du Groupe français, trop exclusivement parisienne, donc trop bureaucratique, sous-estime la valeur et les possibilités de nombreux camarades de province… Il est trop tard pour se lamenter sur l'apathie des éducateurs hors de notre groupe. Le dilemme est grave : ou bien le Groupe français vit et travaille, ou bien il piétine et meurt, et nous ne saurions le suivre dans son suicide.


Un numéro spécial de l'Educateur Prolétarien du 15 octobre 1936 sur la réforme C.E.L. de l'enseignement remporte un beau succès auprès des instituteurs.

Nous voulons une école plus efficiente que l'école traditionnelle où tant d'efforts se dépensent en vain. L'école actuelle n'est adaptée ni aux moyens que nous offre la civilisation actuelle, ni au mode de vie contemporain, ni aux buts sociaux qui évoluent à un rythme accéléré.

Il faut réorganiser l'enseignement sur des bases plus rationnelles.

La pédagogie Freinet est susceptible d'inspirer la réforme de l'enseignement lancée par le gouvernement du Front Populaire. La voilà en passe de devenir le Plan d'Etude Français. Le projet a été adressé aux députés du Front Populaire et transmis au Ministère de l'Eduction Nationale.

Nous sommes à un tournant de notre histoire pédagogique. Pendant des années, nous avons travaillé et lutté au milieu de l'indifférence presque générale. Nous avons, patiemment, perfectionné notre matériel, mis au point nos techniques.

Et maintenant, les hardiesses et les paradoxes d'hier sont entrain de devenir des réalités et parfois même des lieux communs. Après le Nouveau Plan d'Etudes Belge, si favorable à nos techniques, après le Plan d'Etudes Espagnol, qui va sans réserve dans le sens de notre effort, la France prépare sa nouvelle orientation pédagogique qui sera directement influencée par nos techniques.

Freinet voyage beaucoup, il parcourt la France en tous sens, de conférence en conférence. Il exhorte son auditoire à sortir de sa nuit pour le suivre sur la voie accidentée mais exaltante des sources claires où vient boire le cheval qui n'a pas soif, écrit Madeleine Freinet.

La visite d'écoles travaillant selon les techniques C.E.L. devient courante et l'administration leur confie des expériences à mener.

Les adhérents se multiplient, alors pour former les nouveaux venus, Freinet lance en 1937, les Brochures d’Éducation Nouvelle Populaires (BENP).  

L'école accueille des jeunes réfugiés espagnols, victimes de la guerre civile en Espagne. Une école “Célestin Freinet” est ouverte à Barcelone par la Généralité de Catalogne.

Freinet salue le progrès des nouvelles Instructions Officielles du 24 septembre 1938.

Nous y avons vu la réalisation progressive du Nouveau Plan d'études français que nous réclamions il y a deux ans, et pour lequel nous avons obstinément apporté tant de précieux éléments.


Et la guerre éclate, ce qui change l'aspect des choses.

- La technique Freinet,  coll. Brochures d'Éducation Nouvelle Populaire n° 1, Méthode Nouvelle d'Education Populaire basée sur l'expression libre par l'imprimerie à l'école, Editions de l'Ecole Moderne Française, Cannes, 1937.

- Principes d'alimentation rationnelle (Menus naturistes et 250 recettes naturistes), Elise Freinet,

2e édition, Éditions de l'Imprimerie à l'École, Vence, 1939.

- Le fichier coopératif,  coll. Brochures d'Éducation Nouvelle Populaire n° 5, L'imprimerie à l'école, Vence, février 1938.

  

- Technique d'étude du milieu local, J. Puget, coll. Brochures d'Éducation Nouvelle Populaire n° 12, L'imprimerie à l'école, Vence, novembre 1938.

De nombreux instituteurs du mouvement sont mobilisés.

L'Educateur d'octobre 1939, perd son adjectif Prolétarien, trop révolutionnaire en ces temps de censure.

La publication des Pionniers, journal des enfants de l'école Freinet est interdite.

Les activités du Mouvement Freinet sont interrompues. L’école de Vence est fermée.

Freinet est arrêté, sur dénonciation, le 20 mars 1940: il quitte son école entre deux gendarmes, sous les yeux des enfants. Il est interné à Saint-Maximin (Var) puis transféré au camp de Saint-Sulpice (Tarn). Son état de santé est des plus critiques.

En Avril 1941 Elise quitte Vence pour Vallouise (Hautes-Alpes), chez sa mère .

A sa libération, Freinet la rejoint. Il y écrit ses principaux ouvrages, publiés après la guerre.

Au Printemps 1944 il rejoint puis dirige le maquis FTP de Béassac.

Il est porté à la tête du Comité Départemental de Libération de Gap.

Réouverture de l'école Freinet


À la Libération, tout est à refaire. Il faut des mois de démarches pour récupérer la totalité des locaux et du mobilier, obtenir réparation des dépravations et disparitions de matériel.

L'école n'ouvre qu'à la rentrée 1946 avec un, puis plusieurs instituteurs mis à la disposition de Freinet par l'Etat (jusqu'en 1950).

L’Éducateur reparaît.

René Capitant, ministre de l'Éducation nationale constitue une commission le 8 novembre 1944, pour réformer l'éducation. Elle est présidée par P. Langevin et H. Wallon. Freinet, pourtant un des éléments moteurs de la rénovation, est déçu d'être tenu à l'écart de la commission.

Les groupes C.E.L. sont invités à rejoindre le G.F.E.N. (Juin 1945)

En juillet, Freinet lance un projet d'Union Pédagogique qui réunirait tous les mouvements d'éducation ; le projet échoue.

En février 1946 Freinet s'éloigne du G.F.E.N. qui est présidé par Paul Langevin (à sa mort le 19 décembre 1946, Henri Wallon lui succède)..

En avril 1946, la C.E.L. s'installe à Cannes afin de faciliter l'envoi de colis par gare. Freinet pour relancer le mouvement réside à Cannes, mais monte plusieurs fois par semaine à Vence.

Le Mouvement Freinet se développe rapidement. Il s’organise en 1947 en une association loi 1901, l'Institut Coopératif de l’École Moderne (I.C.E.M.) qui devient désormais le mouvement pédagogique dont la C.E.L. est l'éditeur et diffuseur.

En juillet 1947 se déroule le premier voyage-échange entre classes correspondantes.

La C.E.L. s'intéresse un moment au film fixe, mais Freinet veut limiter la longueur des bandes pour éviter le danger d'un cours magistral en image. Cette contrainte empêche toute édition rentable. Le projet est donc abandonné.

Elise Freinet s'attache à développer l'expression libre par le dessin en changeant la pédagogie développée jusqu'ici : ce ne doit pas être une technique de reproduction mais un moyen d'expression lyrique.


En 1949, le film L’École buissonnière de J.P. Le Chanois, sur un scénario d’Élise Freinet sort dans les salles de cinéma. Ce film populaire est un succès et a un énorme retentissement. Le leitmotiv musical du film, "J'ai lié ma botte", reste pendant des années le chant de ralliement des débuts de séances de congrès.

C’est aussi l’année où paraît le livre Naissance d’une pédagogie populaire d’Élise Freinet, historique de l'Ecole Moderne.

L'année suivante sort le BT n°100 L'École Buissonnière.


Des calomnies sont diffusées par certains responsables du PC contre Freinet mettant en cause son attitude pendant la guerre. Freinet et Élise quittent le Parti.

L'attaque se poursuit par une série d'articles paraissant dans la Nouvelle Critique.

G. Snyders engage le procès dans le numéro d'avril 1950. Il affirme la fausseté des principes pédagogiques de Freinet: quoi qu'il an ait dit, il parvient en fait aux mêmes positions réactionnaires que Dewey, Dottrens et Piaget. Cette pédagogie est une mystification car elle minore la part du maître, borne l'esprit de l'enfant aux apparences, le laisse incapable de comprendre le monde et de le transformer, elle "fait croire aux maîtres (…) qu'on peut à l'intérieur du capitalisme construire des oasis de socialisme, (elle) les détourne évidemment de la lutte effective."

Freinet en réponse dans l'Educateur (1er juin 1950) exprime son indignation devant les erreurs et les sous-entendus de Snyders. Il réaffirme "le rôle éminent, vraiment magistral, que l'Ecole Moderne attend des maîtres. Loin de les confiner dans des trucs pédagogiques, il les incite à lutter avec les parents " contre l'exploitation et l'abêtissement". Quant au contenu de l'enseignement, il explique qu'au niveau élémentaire il s'agit d'abord de former des esprits, que ce serait du dogmatisme que d'enseigner des mots (…) des idées sans assise sûre dans la vie de l'enfant et dans son expérience d'enfant du peuple".

En juin 1951, G. Gogniot donnait un premier article ; ce n'était pas une conclusion, mais "un rappel des principes simples qui doivent guider le jugement" ; Il posait la question de savoir si les positions de Freinet étaient conformes à ce qu'il appelait "les positions marxistes sur l'école". Selon lui, dans la société capitaliste l'école a un caractère de classe, le problème du contenu de l'enseignement est central, la question des méthodes seconde, et il opposait le véritable éducateur populaire à l'éducateur bourgeois partisan de l'éducation libre, croyant au fatalisme du développement de l'enfant, cultivant l'individualisme. (Jacques Testanière)

Le mouvement résiste à ce procès malgré l'abandon de quelques militants communistes.

Pour que l'unité du mouvement ne soit pas compromise, devant les scissions politique et syndicale qui se produisent à gauche, une Charte de l'Ecole Moderne est adoptée en 1950 au congrès de Nancy.

Le tâtonnement expérimental (1943)

Selon Freinet, l'enfant apprend par tâtonnement expérimental.

Il s’agit de laisser les enfants émettre leurs propres hypothèses, faire leurs propres découvertes, éventuellement constater et admettre leurs échecs mais aussi parvenir à de belles réussites dont ils peuvent se sentir les vrais auteurs. Les résultats ? Une motivation très forte, une implication immédiate de chaque enfant, qui acquiert ainsi confiance en lui et en ses possibilités de progresser par lui-même. L’intérêt réside aussi dans le fait qu’il est inutile d’apprendre par cœur quelque chose que l’on a découvert par le tâtonnement expérimental ; on s’en souvient sans effort...

Il est important de préciser la part de l’enseignant dans ce qui n’est que du tâtonnement. Le rôle de l’instituteur est de transformer cela en foisonnement organisé. Il suffit de beaucoup d’écoute et de quelques interventions au bon moment, soit pour donner un petit coup de pouce à une idée intéressante émise par un élève et qui ouvre des portes sur la compréhension du phénomène observé, soit, mais le plus rarement possible, pour proposer un changement de cap si la recherche ou la discussion s’enlisent ou partent dans une direction vraiment stérile, soit pour indiquer des pistes documentaires pour poursuivre la recherche ou valider des intuitions ; dictionnaire, livre, Internet.

Le tâtonnement expérimental peut-être utilisé en sciences, mais aussi en histoire, en géographie, et même pour l’apprentissage de la lecture ou du calcul.

Vivarium, « jardin scolaire », musée... (1946)

Freinet recommande « l'administration du jardin », le musée, le vivarium... :

Si l’école possède un jardin, cédez-le aux enfants qui le travailleront eux-mêmes, avec votre aide et vos conseils, sous l’égide et au bénéfice exclusif de leur Coopérative. Sinon, tâchez de vous en procurer un, le moins loin possible de l’école : potager, parterre, fruitier, pépinière, ruches, lapins, oiseaux, poules, chèvres (selon la région, les préférences et les possibilités).



La méthode naturelle (1947)

Freinet a découvert cette méthode en observant parler, marcher, lire sa propre fille, Baloulette (Madeleine Freinet, née en 1929). Il prône la « méthode naturelle », appuyé sur le tâtonnement expérimental, la libre expression, le matériel pédagogique.

Par la méthode naturelle, l'enfant lit et écrit bien avant d'être en possession des mécanismes de base, parce qu'il accède à la lecture par d'autres voies complexes, qui sont celles de la sensation, de l'intuition et de l'affectivité dans le milieu social... L'élève de l'école moderne cherchera d'abord à comprendre ce que signifient les signes, parce que, pour lui, pour la construction de sa vie, seul le sens importe. Nous le verrons alors scruter le texte globalement et ajuster les connaissances techniques qu'il a pu acquérir par ses précédentes expériences et qui joueront le rôle de poteaux indicateurs qui l'aideront à s'orienter.

  

- Disques et Phonos, Y. et A. Pagès, coll. Brochures d'Éducation Nouvelle Populaire n° 13, L'imprimerie à l'école, Vence, décembre 1938.

- L'Educateur Prolétarien, L'imprimerie à l'école, le cinéma, la radio, les techniques nouvelles d'éducation populaire, N°1, Editions de l'Imprimerie à l'Ecole, Saint-Paul, octobre 1932.

- Bibliothèque de Travail, collection de brochures mensuelles pour le travail libre des enfants, histoire du véhicule par A. Carlier, N°1, L'Imprimerie à l'Ecole, Vence, février 1932.

  

- Fichier scolaire coopératif N°2050, L'écureuil de Pierre Deslandes

L’incident de Saint-Paul : une coalition de la Bêtise et de la Réaction


L’instituteur Freinet, qui enseigne à Saint-Paul, non loin de Nice, depuis quatre ans, s’est fait connaître auprès de tous les pédagogues sérieux de France et du monde par l’œuvre admirable qu’il accomplit avec un bel acharnement. Freinet est l’initiateur d’une technique nouvelle, l’imprimerie à l’école, il a créé La Gerbe, la première revue d’enfants entièrement écrite et illustrée par les écoliers, il a créé une collection de brochures d’enfants, les « Enfantines », extraits de La Gerbe, toutes initiatives que les lecteurs de Monde connaissent ; nous avons souvent parlé dans notre journal du bel effort de Freinet, de ses réussites ; lui-même exposa dans nos colonnes le sens et le résultat de son expérience, nous avons reproduit souvent des dessins de La Gerbe ; on sait donc que, comme l’écrivait un pédagogue, cette modeste petite localité de Saint-Paul est presque une « capitale pédagogique » de l’Europe.
On nous précise comme suit la situation matérielle de l’école de Saint-Paul :
La classe se tient dans un local sombre, sans soleil l’hiver ; le plancher disjoint est tout bosselé, et les vieux bancs branlants dansent sans cesse sur les monticules, quel que soit le soin avec lequel les enfants entassent sous les pieds planches et coins.
Les cabinets se déversent dans une fosse étanche qui n’est jamais vidée à fond. Régulièrement, plusieurs fois par an, ils débordent et le purin s’en vient paraître jusqu'à la porte du préau, les vers envahissent parfois le réduit, obligeant le maître à condamner la porte, pour envoyer les enfants, au mépris de toute hygiène, faire leurs besoins aux remparts.

Point d’eau ! Les enfants eux-mêmes doivent aller à la fontaine du village, à 100 mètres, faire la provision indispensable, aux risques et périls de l’instituteur responsable.
Chauffage ! Un vieux poêle est au milieu de la classe et les tuyaux menacent sans cesse de s’écrouler sur la tête des élèves. Bien mieux, notre camarade Freinet est obligé de refendre lui-même le bois et de fournir, la plupart du temps, le bois d’allumage, sinon il n’y aurait jamais de feu.

Une deuxième classe, récemment créée, est installée dans un local de la vieille tour municipale ; elle n’est éclairée que par une fenêtre et elle n’est jamais ni blanchie ni balayée.
Aucun crédit d’enseignement : il n’est accordé que 50 francs par an pour deux classes pour l’encre et la craie. Une Caisse des Ecoles fondée par Freinet, il y a quatre ans, a permis d’acheter un cinéma et quelques livres, mais, depuis deux ans, il est impossible d’obtenir du maire, président, la convocation du Conseil de la Caisse des Ecoles, et l’argent reste inemployé pendant que les écoles pâtissent.
Pourquoi ce délaissement scandaleux ? Le Maire de Saint-Paul, sans enfant, en a donné la raison à M. l’Inspecteur Primaire :
- Vous pouvez supprimer les quatre classes de Saint-Paul si vous voulez...
Tout cela ne suffisait pas... Freinet ne mêle pas la politique et l’enseignement, comme tant de curés et maîtres réactionnaires.

Mais Freinet est révolutionnaire. C’est son droit le plus strict et le plus absolu. Nul ne peut rien contre ce droit. Or, au cours d’une réunion politique, Freinet posa une question à un candidat réactionnaire, une question embarrassante sur le budget. Cela suffit.
Le lendemain, des affiches recouvraient les murs de Saint-Paul, dénonçaient le « bolchevik » Freinet et déclenchaient sur lui la plus ignoble campagne fondée sur un faux. Voici l’histoire, à la suite de laquelle Freinet est menacé de poursuite et de révocation :
De par la méthode même qu’il emploie, Freinet laisse toute liberté d’expression à ses petits élèves. Les textes écrits par les écoliers prennent place dans un cahier, le Livre de Vie que les parents lisent journellement. Un des écoliers est un enfant difficile, en qui Freinet avait décelé certains mauvais instincts. Il en avertit les parents qui tombèrent d’accord et lui confièrent l’enfant, pour essayer des méthodes d’amendement. Freinet voulut sonder le subconscient du petit ; sur un thème donné par lui, les enfants devaient écrire librement comme toujours. L’enfant, le petit Diaz, décrivit son rêve, où il parlait de tuer le maire...
Imagination puérile et déréglée, bavardage d’enfant qu’il faut surveiller. Or, les affiches attaquant Freinet donnaient le texte puéril comme étant la dictée faite par l’instituteur à ses élèves. Et de clamer alors : Voilà l’éducation... Voilà la provocation malsaine... etc., etc.
Et voilà. Toute la réaction, Echo de Paris, Action française, emboîte le pas à cette mensongère infamie et aboie contre Freinet. On cite encore d’autres textes de sujets d’inspiration pacifiste donnés par Freinet. Crime inexpiable ! Les plus sournoises manœuvres ont eu lieu, on a arraché à des parents des protestations qu’ils viennent d’ailleurs de rétracter... Le maire de Saint-Paul lui-même vient aussi de reculer et de se déclarer « incompétent ». Les amis de Freinet apportent, par centaines, des témoignages d’admiration venus de partout en faveur de l’œuvre accomplie par Freinet.
La réaction ne lâche pas et veut « avoir » cet instituteur laïque et révolutionnaire.
A tous ceux qui défendent l’école populaire et la pédagogie neuve de défendre Freinet ; sa défense, c’est celle de toute l’école populaire, des méthodes saines de rénovation pédagogique, contre la crasse routinière, l’école chauvine et cléricale.
(
Monde du 7 janvier 1933)

CPA, Au pied des Baous, face à la mer : l'école Freinet, La lessive,

Le travail libre sur fiches auto-correctives, Editions de l'Ecole Freinet, Vence (Alpes-Maritimes).

Création de la Fédération Internationale des Mouvements d'Ecole Moderne


Au congrès de Nantes de 1957, la FIMEM est créée, regroupant les Mouvements de dix pays et consacrant le rayonnement international de la pédagogie Freinet.

Lancement du supplément SBT , de la revue Techniques de Vie, les fondements philosophiques des techniques Freinet qui deviendra devant le peu de succès, bulletin interne, en 1962.

Lancement également de la collection Bibliothèque de l'Ecole Moderne, petits livrets de pédagogie pratique et création de la revue L'art enfantin, animée par Elise Freinet.

Création en 1959 de la BT Sonore (disque, livret et diapositives).

Freinet lance en Février 1963 les bandes enseignantes.

Publication du livre d'Elise Freinet L'enfant artiste.

En 1964, l’école Freinet est reconnue comme école expérimentale, et ses enseignants sont pris en charge par le ministère de l’Éducation Nationale. Sa renommée attire de nombreux stagiaires et visiteurs du monde entier, et tous les étés s’y déroulent des rencontres appelées “journées de Vence” avec la participation de personnalités et de chercheurs du monde de l’éducation.  

Publication du livre Bandes enseignantes et programmation.

Fin 1964, grave conflit de Freinet avec C. Pons, directeur de la CEL.

Octobre 1967 Création de la BT junior (BTJ)


Freinet décède à Vence en octobre 1966, il est inhumé dans son village natal de Gars.

Élise Freinet continue leur œuvre et assure la gestion de l’école jusqu’à son décès en 1983. Leur fille Madeleine Bens-Freinet l’assume jusqu’en 1991. En difficultés financières, elle convainc le ministre de l’Éducation nationale Lionel Jospin de racheter l’école : l’École Freinet devient école publique d’État (à statut expérimental, hors carte scolaire), sous tutelle de l’Inspecteur d’Académie de Nice. Il est dit clairement que la vocation de l’école est de préserver la pédagogie qui a été voulue ici par Élise et Célestin Freinet.

De nos jours, les classes coopératives de l’École Moderne fonctionnent toujours avec les techniques de l’expression libre et du journal scolaire, de la correspondance interscolaire et des réseaux, avec l’apport des techniques modernes que sont l’informatique, la vidéo, l’Internet ... Comme à ses origines, un même espoir en la liberté de l’enfant et en l’Homme anime les enseignants de l’ICEM, convaincus que la pédagogie de Freinet, vivante et généreuse, est porteuse d’une éducation populaire synonyme d’espoir et de modernité pour le 21ème siècle.

  

Les invariants pédagogiques

En 1964, deux ans avant sa mort, Freinet rédige les « invariants pédagogiques ».

« C'est une nouvelle gamme des valeurs scolaires que nous voudrions ici nous appliquer à établir, sans autre parti pris que nos préoccupations de recherche de la vérité, à la lumière de l'expérience et du bon sens. Sur la base de ces principes que nous tiendrons pour invariants, donc inattaquables et sûrs, nous voudrions réaliser une sorte de Code pédagogique… »

Invariant no 1 : L'enfant est de la même nature que nous.

Invariant no 2 : Être plus grand ne signifie pas forcément être au-dessus des autres.

Invariant no 3 : Le comportement scolaire d'un enfant est fonction de son état physiologique, organique et constitutionnel.

Invariant no 4 : Nul - l'enfant pas plus que l'adulte - n'aime être commandé d'autorité.

Invariant no 5 : Nul n'aime s'aligner, parce que s'aligner, c'est obéir passivement à un ordre extérieur.

Invariant no 6 : Nul n'aime se voir contraint à faire un certain travail, même si ce travail ne lui déplaît pas particulièrement. C'est la contrainte qui est paralysante.

Invariant no 7 : Chacun aime choisir son travail, même si ce choix n'est pas avantageux.

Invariant no 8 : Nul n'aime tourner à vide, agir en robot, c'est-à-dire faire des actes, se plier à des pensées qui sont inscrites dans des mécaniques auxquelles il ne participe pas.

Invariant no 9 : Il nous faut motiver le travail.

Invariant no 10 : Plus de scolastique.

Invariant 10 bis : Tout individu veut réussir. L'échec est inhibiteur, destructeur de l'allant et de l'enthousiasme.

Invariant 10 ter : Ce n'est pas le jeu qui est naturel à l'enfant, mais le travail.

Invariant no 11 : La voie normale de l'acquisition n'est nullement l'observation, l'explication et la démonstration, processus essentiel de l'École, mais le tâtonnement expérimental, démarche naturelle et universelle.

Invariant no 12 : La mémoire, dont l'École fait tant de cas, n'est valable et précieuse que lorsqu'elle est vraiment au service de la vie.

Invariant no 13 : Les acquisitions ne se font pas comme l'on croit parfois, par l'étude des règles et des lois, mais par l'expérience. Étudier d'abord ces règles et ces lois, en français, en art, en mathématiques, en sciences, c'est placer la charrue devant les bœufs.

Invariant no 14 : L'intelligence n'est pas, comme l'enseigne la scolastique, une faculté spécifique fonctionnant comme en circuit fermé, indépendamment des autres éléments vitaux de l'individu.

Invariant no 15 : L'École ne cultive qu'une forme abstraite d'intelligence, qui agit, hors de la réalité vivante, par le truchement de mots et d'idées fixées par la mémoire.

Invariant no 16 : L'enfant n'aime pas écouter une leçon ex cathedra.

Invariant no 17 : L'enfant ne se fatigue pas à faire un travail qui est dans la ligne de sa vie, qui lui est pour ainsi dire fonctionnel.

Invariant no 18 : Personne, ni enfant ni adulte, n'aime le contrôle et la sanction qui sont toujours considérés comme une atteinte à sa dignité, surtout lorsqu'ils s'exercent en public.

Invariant no 19 : Les notes et les classements sont toujours une erreur.

Invariant no 20 : Parlez le moins possible.

Invariant no 21 : L'enfant n'aime pas le travail de troupeau auquel l'individu doit se plier comme un robot. Il aime le travail individuel ou le travail d'équipe au sein d'une communauté coopérative.

Invariant no 22 : L'ordre et la discipline sont nécessaires en classe.

Invariant no 23 : Les punitions sont toujours une erreur. Elles sont humiliantes pour tous et n'aboutissent jamais au but recherché. Elles sont tout au plus un pis-aller.

Invariant no 24 : La vie nouvelle de l'École suppose la coopération scolaire, c'est-à-dire la gestion par les usagers, l'éducateur compris, de la vie et du travail scolaire.

Invariant no 25 : La surcharge des classes est toujours une erreur pédagogique.

Invariant no 26 : La conception actuelle des grands ensembles scolaires aboutit à l'anonymat des maîtres et des élèves; elle est, de ce fait, toujours une erreur et une entrave.

Invariant no 27 : On prépare la démocratie de demain par la démocratie à l'École. Un régime autoritaire à l'École ne saurait être formateur de citoyens démocrates.

Invariant no 28 : On ne peut éduquer que dans la dignité. Respecter les enfants, ceux-ci devant respecter leurs maîtres est une des premières conditions de la rénovation de l'École.

Invariant no 29 : L'opposition de la réaction pédagogique, élément de la réaction sociale et politique est aussi un invariant. avec lequel nous aurons, hélas! à compter sans que nous puissions nous-mêmes l'éviter ou le corriger.

Invariant no 30 : Il y a un invariant aussi qui justifie tous nos tâtonnements et authentifie notre action : c'est l'optimiste espoir en la vie

- Technique de l'Imprimerie à l'École, Brochures d'Education Nouvelle Populaire, C. Freinet, nouvelle édition préparée par C. Drevet, 2e édition, Editions de l'Ecole Moderne Française, Cannes, juin 1949.

Dès la sortie de L'Ecole Buissonnière, Freinet annonce la mise en chantier de films documentaires montrant la réalité des techniques Freinet.

Faute de producteur pour assurer le financement et la diffusion, la CEL doit réaliser elle-même les films 16mm, format utilisé par les circuits de cinéma des amicales laïques.

Le premier projet mis en chantier est une illustration du dit de Mathieu : Le cheval qui n'a pas soif.

Quatre films sont tournés en moins d'un an mais ils sont loin d'être terminés. Seul le premier est vraiment bouclé au printemps 52 et peut être présenté aux militants à Pâques au congrès de La Rochelle.

A ce congrès, de vives discussions s'établissent sur les films CEL et leur financement. Certains trouvent que ce n'est pas le moment d'ouvrir un secteur important de dépenses nouvelles alors que le financement des urgences est déjà difficile.

Freinet crée une caisse spéciale, appelée Guilde du cinéma, alimentée par de nouvelles souscriptions. Elle ne tarde pas à être supprimée vu l'opposition de nombreux militants.


Des nouveaux locaux de la CEL sont construits à Cannes.


Il se développe une pratique de la création audiovisuelle par les enfants, l'équivalent du dessin libre. Cela commence par des expériences très limitées, mais très formatrices de radio locale en circuit fermé.

Pierre Guérin avec un jeune technicien fabricant d'appareils G. Paris à Sainte-Savine (Aube), passionné comme lui par cette nouvelle technologie, se lancent dans la mise au point de matériels adaptés aux besoins des enseignants: c’est la naissance du « Parisonor » en 1953.


En 1953, le congrès de Rouen est suivi d'attaques dans L'Ecole et la Nation journal du PCF.

Attaques de la section locale du PC contre Freinet, « patron » de la CEL

Mieux encore, c'est au sein de l'entreprise de la C.E.L., entreprise coopérative dont FREINET assume le poste de Directeur, avec un Conseil d'Administration élu, que le P.C.F. va porter également ses coups dès 1952.

Ces tentatives échouent, et le C.A. de la C.E.L. soutient énergiquement FREINET en prenant les décisions nécessaires pour sauvegarder l'autonomie de l'entreprise coopérative contre toutes les velléités qui se feront encore jour sporadiquement jusqu'en 1954, au Congrès de Chalons sur Saône où sera adoptée la Charte de l'École Moderne.

On a pu voir précédemment l'incompatibilité de la pédagogie stalinienne avec les tentatives d'éducation nouvelle.

  

BT N°403 d'avril 1958, Combattant de la guerre de 1914-1918 par Célestin Freinet.

Plus jamais de guerres !

Bar-sur-Loup

- Naissance d'une Pédagogie populaire d'Elise Freinet, bibliothèque de l'Ecole Moderne, 2ème édition, 1963.

  

- Les techniques audio-visuelles, par C. Freinet et les Commissions de l'I.C.E.M.,  coll. Bibliothèque de l'École Moderne n° 18-19 Cannes, 1963.

- Les boîtes de travail C.E.L., boîtes mathématique libre recherche et création, Coopérative de l'Enseignement Laïc, Cannes, avril 1970.

- BTJ N°344, L'école d'autrefois... vers 1920, Publication de l'Ecole Moderne française, 1991.

Extraits de la Gerbe et des journaux scolaires, Ecole de Solterre (Loiret), Les aventures de quatre gars, Editions de l'imprimerie à l'école, Saint-Paul, juillet 1929.

  

- Enfantines, extraits de la Gerbe et des journaux scolaires, Ecole de Gennetines-Saint-Plaisir (Allier), Le mariage de Niko, Editions de l'imprimerie à l'école, Saint-Paul, octobre 1932.

  

- Boîte Limographe, La CEL, Cannes.

Appareil genre Ronéo, spécialement conçu et réaliser pour tirage sur format 13,5x21 ou 21x27.

  

- Clarté, N°49 du 15 décembre 1923.

Article de Freinet : Vers l'école du prolétariat, La discipline nouvelle. Quelques réalisations.

- Bibliothèque enfantine, les petits soleils de la mer, Editions de l'Ecole Moderne Française, 1970.

- J magazine, N°1, septembre 1979,publications de l'Ecole Moderne Française, Cannes.

- Pour l'école du peuple, Célestin Freinet, Petite collection maspéro, 1972.

" L'école a dressé des écoliers. Elle a oublié de préparer des hommes."

(Discours à des Parents sur la Pédagogie nouvelle prolétarienne, Célestin Freinet)

- Presse à volet, en aluminium, mise au point par la C.E.L., imprimant le format 13,5x21.

- Matériel d'imprimerie CEL. provenant de l'ecole de Chennevières, Conflans Sainte Honorine (S. ET O.).

Pour la production d'un journal scolaire mensuel : Les nouvelles de notre classe.

BT Sonores


Ce sont les albums de l'Encyclopédie audiovisuelle enfantine de la CEL.

Pourquoi ce sigle: BT? Parce qu'elles sont réalisées dans le même esprit et poursuivent le même but que la collection de brochures illustrées de documentation Bibliothèque de Travail.

- 1 disque 45 t prolongé, documents sonores,
- 12 diapositives couleur,
- 1 livret de travail,
- 1 ou plusieurs brochures BT.

Cette documentation est essentiellement conçue pour l'enfant, contrairement à la majorité des documentations réalisées pour le maître.

La documentation au niveau de l'enfant est un élément important dans la pratique de l'École Moderne.

Nous dirons même que sans documentation valable, une partie des ambitions de l'École Moderne est irréalisable...

En aucun cas les BT Sonores ne sont des leçons toutes faites.

Ce sont des documents sonores illustrés de diacouleurs ; documents également rigoureusement authentiques.

La projection des diapositives est synchronisée avec la diffusion du disque, mais les éléments sonores et visuels forment isolément un tout qui se suffit à lui-même.

La possibilité de l'exploitation séparée des documents sonores et visuels situés sur des supports différents, permet une souplesse d'emploi très grande s'adaptant à toutes les techniques de classe depuis le débat, - chose du maître, - la leçon classique sur document, jusqu'à l'utilisation pour conférence d'enfant, enquête indirecte, et comme nous l'avons expérimenté ces dernières années avec l'aide de la bande programmée.

La totalité des réalisations ou presque est issue des travaux des classes pratiquant l'enregistrement magnétique et également le montage audiovisuel avec diapositives.

C'est la mise en archive des meilleures réalisations, triage et choix parmi celles qui sont envoyées à notre centre de travail qui permet une authenticité rigoureuse, impossible à obtenir de la part d'une maison d'édition et la possibilité de synthèses assez larges.

La collection BT Sonore a débuté en 1959.